Magazine du design urbain

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Mobilier urbain, mobilier domestique : de l’importance du savoir-faire des entreprises

Détail banquette gamme Onda - Photographie Yann Monel
Collection assises « Onda », éditeur Mobil Concepts – Photographie Yann Monel

Mobilier urbain et mobilier domestique : deux secteurs qui, au premier abord, paraissent proches, mais sont en fait très dissemblables.

Outre leur utilisation, ce sont surtout leurs filières de production qui s’opposent. D’un côté, une production très dynamique, sans cesse renouvelée car soumise à la loi du marché : celle de l’univers domestique. De l’autre, des procédés de fabrication peu évolués fonctionnant sur des habitudes. Convaincre les entreprises d’innover, collaborer avec elles afin de créer de nouveaux procédés, porter jusqu’au bout ces projets : n’est-ce pas là l’avenir du mobilier urbain ?

Développer une intelligence de mise en oeuvre des matériaux

Au designer urbain se pose le problème suivant : varier les formes, les textures, avec un choix limité de matériaux. Bois, béton, pierre, céramique, métal, et dans quelques cas, verre, résistent seuls aux agressions climatiques et physiques des usagers. Cela oblige le designer, s’il souhaite sortir des modèles imposés – planche en bois marron de deux mètres de long, sur pieds en métal noirs ou gris, fabriqué sur la même logique depuis quasiment un siècle – à réfléchir à une utilisation différente de ces matériaux. Graver, découper, emboutir, en somme développer une intelligence au moment de la mise en oeuvre des matériaux, est au coeur de mon travail.

Mais il ne suffit pas de réfléchir à des innovations possibles. Le circuit de production doit suivre, et souvent, ces entreprises sont dans l’incapacité de renouveler leur savoir-faire.

Remettre en cause les circuits de production

Contrairement à l’univers du mobilier domestique qui dispose d’un réseau important de fabricants pour élaborer des objets variés, le secteur du mobilier urbain ne peut s’ouvrir à l’innovation aussi à cause de l’absence de partenaires qui apporteraient un savoir-faire complémentaire. Une grande partie de mon travail est de trouver ces alliés.

Atelier metal mobilier urbain - Photographie Thomas Casubolo

Collection assises « Sita », éditeur Mobil Concepts – Photographie Thomas Casubolo

Quelles entreprises sont prêtes à innover ? Car comment se remettre en question lorsqu’on n’est pas confronté à la sanction de l’usager ? Le mobilier domestique se renouvelle constamment car il est en lien direct avec un acheteur très exigeant, en quête de nouveauté. A contrario, qui voudrait avoir chez lui un objet de mobilier urbain ?

Collaborer avec des entreprises innovantes

Il y a des entreprises innovantes en matière de mobilier urbain, comme Metalco et son distributeur français Mobil Concepts, la Tôlerie forézienne, ou encore Escofet en Espagne. Peu importe leur âge, elles sont portées par une dynamique d’innovation. Par exemple pour le béton, Escofet a développé un béton technique, le béton fibré, qui a transformé cette matière rattachée à de mauvais souvenirs, ceux des grandes cités des années 1970.

Détail gamme Escofet

Effet de matière des assises de la collection « Kelly », éditeur Escofet

Le matériau que j’ai contribué à introduire dans la fabrication du mobilier urbain est la céramique, sur laquelle je travaille depuis trois ans. Nous avons développé avec le CRAFT Limoges (Centre de recherche sur les arts du feu et de la terre) et le Pôle européen de la céramique des procédés techniques très innovants qui assurent à la fois solidité et esthétique à la céramique. Mon défi a été de trouver un partenaire industriel capable de produire ces prototypes en série.

Notre projet de mobilier urbain pour les nouveaux souks de Beyrouth nous a mis face à ce problème. Afin de répondre à des exigences de qualité très élevées de la part de notre client, nous avons développé plusieurs prototypes. La difficulté a été ensuite de trouver le bon partenaire : nous y sommes aujourd’hui parvenu.

Créer du mobilier urbain en adoptant une démarche unique

Tout cela demande évidemment beaucoup de temps et d’énergie. C’est la particularité de mon travail et de ma démarche. Porter nos projets d’innovations d’un bout à l’autre de la chaîne, en essayant de modifier les habitudes et les structures, en en créant de nouvelles, cela en gardant des coûts raisonnables. Un croquis ne suffit pas, il faut porter le projet  jusqu’au bout et façonner quelque chose qui n’existe pas.

Au delà de la maîtrise de cette innovation et sa réalisation, nous veillons à tenir un haut niveau de qualité vis-à-vis du client. C’est aussi la spécificité de notre travail, assurer un contrôle de la qualité pendant et après la livraison du projet. La qualité se situe là aussi, et nos clients l’apprécient. Cette démarche de création, qui non seulement remet en question les modèles établis, mais assure la réalisation complète de ces innovations, est quelque chose que je revendique.

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