Chaleureux, apaisant, économe en énergie : et si le bois était l’avenir de la ville ? Stéphane Bouquet y croit dur comme fer. En 2009, il a monté Ywood Business, une filiale du groupe Nexity dédiée à la construction de bâtiments en structure bois massif. Il nous raconte pourquoi et comment ce matériau va changer la donne.
Stéphane Bouquet, vous dirigez Ywood, l’entité dédiée aux constructions bois du promoteur Nexity. Comment est né ce projet ?
L’aventure Ywood a été lancée il y a cinq ans, en décembre 2009, lors d’une conférence au SIMI (Salon de l’Immobilier d’Entreprise). Clients, partenaires, investisseurs ont réservé un bel accueil à ce projet. L’originalité de la démarche était de partir des besoins clients pour monter une offre pertinente, et pas de considérations techniques. Nos partenaires sont impliqués depuis le début, nous avons consacré un large temps d’étude qui nous permet aujourd’hui d’appréhender tous les cas de figure et donc, de gagner du temps.
Cinq ans, c’est court et long à la fois, il a fallu initier le projet, trouver les terrains et les relais en régions… aujourd’hui, on est fiers d’avoir livré quatorze immeubles, une quinzaine de projets sont en cours.
Quelles sont les possibilités d’innovations qu’offre cette technologie ?
Commençons par la remarque que tout le monde se fait en premier lieu, car on est tous marqués par les cabanes en bois de notre enfance : le bois, ça brûle ! Or les portes coupe-feu des bâtiments sont faites… en bois. En fait, le bois qu’on utilise est un bois entrecollé entrecroisé, du bois plein, une technique connue sous le vocable C.L.T. (Cross Laminated Timber). L’oxygène ne pénètre pas dans ce matériau bois, contrairement au bois « creux » dit à ossature bois.
Une fois qu’on a intégré cette donnée, on comprend que le bois offre de multiples avantages : c’est une ressource renouvelable, qui ne nécessite aucun traitement chimique (le bois est imputrescible), il absorbe le CO2, il est techniquement performant (énergie, isolation…), il est modulable. Le bois que nous utilisons vient de France ou d’Europe (Suisse, Allemagne, Autriche) et est issu de forêts gérées durablement (Label PEFC), aucun bois exotique n’est utilisé.
De plus le délai de livraison d’un bâtiment en bois est très court : 6 mois, deux à trois fois plus vite qu’un immeuble béton traditionnel. Cela permet de se projeter concrètement dans un avenir proche, et de déposer un préavis sereinement.
L’ensoleillée, premier parc tertiaire en structure bois à énergie positive de France, s’inscrit dans une démarche de dialogue social de la part d’Orange, le locataire des lieux. Quel impact peut avoir ce choix technologique sur la vie de l’entreprise ?
Le parc tertiaire Aix l’ensoleillée est un projet collectif qui a pu fonctionner car nous partions d’un ensemble de valeurs communes. Une équipe s’est créée entre tous les acteurs du projet, il n’y a pas eu de rapports de force entre nous. C’est une source de fierté pour tout le monde.
Orange, qui occupe quatre des cinq bâtiments construits, a partagé sa démarche éco-responsable auprès des collaborateurs qui ont été sensibilisés aux enjeux d’économie d’énergie. On a installé une centaine de capteurs sur l’ensemble du site pour mesurer les résultats de bénéfice durable. C’est bien cela l’enjeu : trouver le bon équilibre entre le coût de construction d’un bâtiment, et ses charges de consommation. Les salariés ont aussi leur rôle à jouer pour économiser l’énergie.
Un autre point fort est la continuité entre la construction et son aménagement intérieur. Tout a été fait pour offrir les meilleurs conditions de travail, et développer la notion de bien-être et de modularité permise par le matériau bois (ndlr : à ce sujet, lire l’interview de Marie-Hélène Tydgat qui a travaillé sur ce projet).
Comment ce bâtiment s’insère-t-il dans l’espace public ? Joue-t-il un rôle moteur dans l’évolution du territoire ?
Les architectes ont tenu à intégrer cette construction dans son environnement. Le cadre naturel a été respecté, il fait partie intégrante de la réalisation. On espère que cela va inspirer le plus grand nombre car aujourd’hui, on est capable de construire des bâtiments bois en ville. Le design du bois rend une construction plus chaleureuse, plus humaine. Comme la musique, le bois lui aussi adoucit les moeurs ! Il est garant de la tradition et permet toutes les connexions modernes.
L’idée n’est pas de faire table rase des autres matériaux, le bois s’associe très bien au béton. Un de nos confrère a fait une construction bois et béton en région parisienne, l’adhésion a été immédiate.
Avec Ywood, on a démarré avec le marché du tertiaire, mais on a d’autre produits : les crèches en villes (Bab’Ywood), les centres médicaux (Med’Ywood), les hôtels (Ywood Hôtel), les résidences services aux séniors (R.S.S.), les résidences étudiants (Ywood Campus)… Nous capitalisons chacune des expériences Ywood pour imaginer des solutions accessibles à tous (et pas seulement aux grandes entreprises cotées).
Ce type de réalisation, mêlant écologie, dialogue social et intégration dans le tissu urbain, inspire-t-il d’autres réalisations du groupe ?
Tout à fait. Il y a une adéquation entre le produit Ywood et la politique sociale de l’entreprise, qui voit dans la crise l’opportunité de poursuivre une grande aventure RSE. On capitalise notre expérience pour donner des idées à d’autres filiales du groupe, dans une logique horizontale d’échange de bonnes pratiques. Au sein du groupe, on organise des groupes de travail (notamment auprès des développeurs), on partage nos retours d’expérience.
Au lancement d’Ywood, on était une AMO (Assistance à Maîtrise d’ouvrage) interne, au service des filiales de promotion. Nous allons maintenant devenir des promoteurs Ywood, nous aurons la maîtrise d’ouvrage de nos réalisations de A à Z. La belle histoire continue !