Magazine du design urbain

Espace Public

La RATP et le design : une relation de longue date


La RATP et les transports parisiens ont toujours été à l’aise avec le design au cours de leur histoire et ce, avant même que le mot n’existe.

Ainsi en 1899, plusieurs concours furent lancés par la Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris, pour concevoir des entourages et des édicules d’accès à ce système encore inconnu. Le jury de l’époque estima alors, à plusieurs reprises, que les projets qui lui étaient présentés n’étaient pas recevables parce que trop classiques et trop imposants.

En décembre 1899, poussé par le temps et alors que le métro devait ouvrir en juillet 1900, le banquier Adrien Bénard, président de la CMP, la toute nouvelle compagnie, fait alors appel avec l’appui du conseil municipal de Paris, à Hector Guimard, Architecte d’art et chantre de l’art nouveau, nouvelle tendance de l’époque. Commande lui est donc passée, sur la base de ce que l’on nommerait aujourd’hui, un « brief ». C’est justement l’existence de ce « brief » qui est intéressante, car elle préfigure le design management tel qu’on le pratique de nos jours.

Le message contenu dans cette commande énoncée par Bénard, était de concevoir un système d’objets industrialisables (il y a d’ailleurs eu plus de 150 entrées Guimard dont il ne subsiste aujourd’hui que 87 exemplaires et un 88eme créé en l’an 2000), de tailles variées, offrant une grande modularité ainsi qu’une très forte expressivité dans la ville, et chargées en 1900 de signifier une modernité et la réalisation d‘une utopie. L’objectif était de transmettre, à une époque où il n’y avait pas encore de grands supports de communication à destination du public, une impression et une image susceptibles de contrecarrer un ensemble de discours soulignant le caractère inquiétant du souterrain. Certaines rumeurs (parfois même journalistiques) affirmaient en effet que les passagers du métropolitain allaient subir durant leur déplacement comme des fluxions de poitrine.

La station Couronnes et son entourage Guimard au début du siècle dernier

Finalement, les entrées Guimard sont le résultat d’un acte très moderne, expression d’une volonté stratégique de communication et d’équipement, où l’objet fonctionnel mis en place est aussi porteur d’un message à l’attention du public.

Cet acte là a été vraiment fondateur d’une pratique.

Il y a eu comme cela, à plusieurs reprises dans l’histoire des transports publics parisiens, des moments d’excellence.

L’arrivée d’un deuxième réseau de métro, baptisé le « Nord-Sud » et créé à l’initiative de l’ingénieur Jean-Baptiste Berlier, en est un autre. Les dirigeants du Nord-Sud avaient une très grande conscience de l’importance de la qualité de l’espace. Cela a donné, entre autres choses, des stations beaucoup mieux décorées notamment par la signalétique, la création de grands couloirs courbes pour accompagner les flux de voyageurs, ainsi que des rames plus claires, plus confortables et mieux ornées que celles plus sombres de la CMP. Il n’est d’ailleurs pas exagéré de penser que le Nord-Sud a, par ces parti-pris originaux, profondément marqué le style de la RATP.

Nous vivons à nouveau une période de créations et de mutations fortes.

De grandes réflexions sur l’avenir de la ville sont en cours, et la question de la mobilité constitue un élément central de ces débats. Les projets conduits par la RATP que nous menons au sein de l’unité «Conception et identité des espaces» veulent contribuer à cette transformation urbaine et l’accompagner. C’est en effet le rôle des métiers de la conception (design et architecture) que d’imaginer des scénarios innovants et profitables pour le plus grand nombre.

Au final, j’espère que ce projet de troisième collection de mobilier pour nos lignes de tram, et le concept novateur qui l’accompagne, concourent, avec d’autres études comparables, actuellement en développement, à faire de la période que nous vivons, un de ces moments d’excellence de l’histoire des transports publics, en alliant les mots création et patrimoine.

Mots clés